Page:Chamfort - Œuvres complètes éd. Auguis t1.djvu/386

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suffit de ne pas reconnaître, pour qu’elle soit anéantie ; telle autre qu’il suffit de ne pas apercevoir, pour la rendre sans effet.

— Ce serait être très-avancé dans l’étude de la morale, de savoir distinguer tous les traits qui différencient l’orgueil et la vanité. Le premier est haut, calme, fier, tranquille, inébranlable ; la seconde est vile, incertaine, mobile, inquiète et chancelante. L’un grandit l’homme ; l’autre le renfle. Le premier est la source de mille vertus ; l’autre, celle de presque tous les vices et tous les travers. Il y a un genre d’orgueil dans lequel sont compris tous les commandemens de Dieu ; et un genre de vanité qui contient les sept péchés capitaux.

— Vivre est une maladie, dont le sommeil nous soulage toutes les seize heures ; c’est un palliatif : la mort est le remède.

— La nature paraît se servir des hommes pour ses desseins, sans se soucier des instrumens qu’elle emploie ; à peu près comme les tyrans, qui se défont de ceux dont ils se sont servis.

— Il y a deux choses auxquelles il faut se faire, sous peine de trouver la vie insupportable : ce sont les injures du temps et les injustices des hommes.

— Je ne conçois pas de sagesse sans défiance. L’écriture a dit que le commencement de la sagesse était la crainte de Dieu ; moi, je crois que c’est la crainte des hommes.