Page:Chamfort - Œuvres complètes éd. Auguis t1.djvu/388

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— La fortune et le costume qui l’entourent, font de la vie une représentation au milieu de laquelle il faut qu’à la longue l’homme le plus honnête devienne comédien malgré lui.

— Dans les choses, tout est affaires mêlées. dans les hommes, tout est pièces de rapport. Au moral et au physique, tout est mixte : rien n’est un, rien n’est pur.

— Si les vérités cruelles, les fâcheuses découvertes, les secrets de la société, qui composent la science d’un homme du monde parvenu à l’âge de quarante ans, avaient été connus de ce même homme à l’âge de vingt, ou il fût tombé dans le désespoir, ou il se serait corrompu par lui-même, par projet ; et cependant, on voit un petit nombre d’hommes sages, parvenus à cet âge-là, instruits de toutes ces choses et très-éclairés, n’être ni corrompus, ni malheureux. La prudence dirige leurs vertus à travers la corruption publique ; et la force de leur caractère, jointe aux lumières d’un esprit étendu, les élève au-dessus du chagrin qu’inspire la perversité des hommes.

— Voulez-vous voir à quel point chaque état de la société corrompt les hommes ? Examinez ce qu’ils sont, quand ils en ont éprouvé plus longtemps l’influence, c’est-à-dire dans la vieillesse. Voyez ce que c’est qu’un vieux courtisan, un vieux prêtre, un vieux juge, un vieux procureur, un vieux chirurgien, etc.

— L’homme sans principes est aussi ordinaire-