Page:Chamfort - Œuvres complètes éd. Auguis t2.djvu/196

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Cependant onze gardes-françaises, du nombre de ceux qui avaient refusé de tourner leurs armes contre le peuple, étaient détenus dans les prisons de l’abbave Saint-Germain. Le 3o juin, un com- missionnaire remit au café de Foi unie lettre, par laquelle on donnait avis au public que la nuit même ils devaient être transférés à Bicétre, lieu, disait la lettre, destiné à de vils scélérats et non à de braves gens comme eux. A peine un citoyen d’une voix forte a-t-il fait, au milieu du jardin, lecture de cet avis, aussitôt plusieurs jeunes gens s’écrient ensemble : A Vabbajel à Vabbajel et ils courent. Le cri se répète ; les vjompagnons se mul- tiplient ; la troupe s’augmente ; les ouvriers qui s’y joignent se munissent d’instrumens, et dix mille personnes arrivent devant la prison. Les portes sont enfoncées, les gardes-françaises sont mis en liberté, ainsi que ceux du guet de Paris et quelques officiers qui, pour diverses causes, s’y trouvaient captifs; les coups redoublés de haches, de pics, de maillets, donnés dans l’intérieur, re- tentissaient au loin, malgré le bruit occasionné par un peuple immense qui emplissait les rues adja- centes. Une compagnie de hussards et de dragons, le sabre à la main, se présente. Le peuple saisit les rênes des chevaux : les soldats baissent le sabre, plusieurs mêmes ôtent leur casque en signe de paix. Les prisonniers délivrés sont conduits en triomphe au Palais-Pvoval par leurs libérateurs. On les fait souper dans le jardin ; ils couchent