Page:Chamfort - Œuvres complètes éd. Auguis t2.djvu/254

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DC ClfAMFORT. a/j

Le même tableau se reproduisait à chacune des barrières qui ferment l’enceinte de Paris. Nous avons préféré celui qu’offrit la barrière de la Con- férence : c’est que ce fut celle dont la destruc- tion laissa le plus de regrets, après que la terreur publique fut calmée, et lorsque le calme eut amené la réflexion. Les amateurs des arts re- grettent encore les figures colossales, et cependant finies, qui décoraient particulièrement cette bar- rière : c’étaient des figures allégoriques de la Bre- tagne et de la Normandie, qui semblaient indi- quer la route qui conduit à la capitale et à ces deux provinces. Le feu les eût faiblement altérées: mais la rage des incendiaires, décidés à tout dé- truire, les porta à employer le fer, qui supplée si cruellement à l’impuissance du feu, et anéantit les formes quand la matière ne peut être con- sumée.

A la même heure, au même instant, d’autres hordes de bandits allèrent brûler les pataches sur la rivière, les cabanes, les meubles des commis, et faisaient ainsi la guerre à la ferme générale sur la terre et sur l’eau. C’est ce qui fait penser à plu- sieurs personnes qu’une partie des désordres de cette journée fut l’effet d’une spéculation de con- trebandiers : supposition qui n’en exclut aucune autre ; car, dans ce bouleversement universel, di- verses causes agissant à la fois, tous les effets ne peuvent se rapporter à une seule. Des vengeances personnelles, des intérêts particuliers, occasion-