Page:Chamfort - Œuvres complètes éd. Auguis t5.djvu/349

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DE CHAMFORT. 3 4^

toutes les courtoisies, jusquà ce qu'il n'existât plus un homme qui osât se montrer empressé à lui plaire ; contre l'opulence extrême , jusqu'à ce qu'il ne lui restât plus im ami assez riche pour Je mener en voiture ou lui donner à dîner. Enfin il se déchaîna contre la frivolité , le bel esprit , la littérature même, jusqu'à ce que toutes ses liaisons, occupées uniquement des intérêts publics, fussent devenues indifférentes à ses écrits, à ses comédies, à sa conversation. Il s'impatientait d'entendre louer son Marcliand de Smjrne comme une comédie révolutionnaire; il s'indignait même qu'on se crût réduit à tenir compte de si faibles ressources pour servir une si grande cause, u Je ne croirai pas à la » révolution, disait-il souvent en 1791 et 1792 , » tant que je verrai ces carrosses et ces cabriolets » écraser les passans. » Voici une^anecdote qui le caractérise. Le lendemain du jour où l'assem- blée constituante supprima les pensions, nous fûmes lui et moi voir Marmontel à la campagne. Nous le trouvâmes, et sa femme surtout, gémis- Siint de la perte que le décret leur faisait éprouver; et c'était pour leurs enfans qu'ils gémissaient. Chamfort en prit un sur ses genoux: « Viens, dit- » il, mon petit ami , tu vaudras mieux que nous; » quelque jour tu pleurei-as, en apprenant qu'il » eut la faiblesse de pleurer ëur toi, dans l'idée que » tu serais moins riche que lui. » Chamfort per- dait lui-même vsa fortune parle décret de la vciiie. — Si Chamfoii, conime on voit , ne passait rien

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