Page:Chamfort - Maximes, Pensées, Caractères et Anecdotes, 1796, éd. Ginguené.djvu/63

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avait parlé à mots couverts à très-peu de personnes, & dont il avait depuis si longtems rassemblé les matériaux.

Le titre est parfaitement dans le genre de son esprit : il était dans sa philosophie de voir comme le produit de ce perfectionnement de civilisation que l’on vante, l’excessive corruption des mœurs, les vices hideux ou ridicules, & les travers de toute espèce qu’il prenait un plaisir malin à caractériser & à peindre.

Je fis donc, en suivant cette division établie par lui-même, un premier triage. La première partie se trouva très-abondante, & me parut susceptible d’être subdivisée par chapitres. La partie des Caractères était la plus faible, soit qu’il se fut moins exercé dans ce genre, soit qu’elle soit plus riche dans les très-nombreux papiers que je n’ai pas. Je la réunis à celle des Anecdotes, & ayant ainsi divisé le tout seulement en deux parties, je réduisis, par un examen sévère, à un seul volume, ce qui, si j’avais tout employé, en pouvait fournir plus de deux.

J’ai éprouvé dans tout ce travail, aussi fastidieux que pénible, que l’amitié donne plus de patience que l’amour-propre, & que l’on peut prendre, pour la mémoire d’un ami, des soins qu’il paraîtrait insupportable de prendre pour soi-même.

Je me serais fort trompé dans mon jugement, si ce volume, & sur-tout si la partir des Maximes et Pensées n’ajoute beaucoup à la réputation de Chamfort, assez connu comme Écrivain & comme Homme de Lettres, mais trop peu comme Philosophe.