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DE LA NOUVELLE-FRANCE

jusques ici, ou ils ont nommé les gouverneurs pour le roi en ce pays là, ou ils se sont servis de tous moyens possibles pour faire révoquer ceux qui avaient été choisis pour cet emploi sans leur participation, en sorte que comme il est absolument nécessaire de tenir en une juste balance l’autorité temporelle qui réside en la personne du roi et en ceux qui la représentent, et la spirituelle qui réside en la personne du dit sieur évêque et des Jésuites, de manière toutefois que celle-ci fût inférieure à l’autre, la première chose que le dit sieur Talon devra bien observer et dont il est bon qu’il ait en partant d’ici des notions presque entières, est de connaître parfaitement l’état auquel sont maintenant ces deux autorités dans le pays et celui auquel elles doivent être naturellement. Pour y parvenir il faudra qu’il voit ici les Pères Jésuites qui ont été au dit pays et qui en ont toute la correspondance, ensemble le procureur général et le sieur Villeray, qui sont les deux principaux du conseil souverain établi à Québec, que l’on dit être entièrement dévoués aux dits Jésuites, desquels il tirera ce qu’ils en peuvent savoir sans néanmoins se découvrir de ses intentions »[1].

Ces accusations étaient graves, surtout dans la bouche du roi. Étaient-elles justes ? Nous ne le croyons pas. Les Jésuites jouissaient au Canada d’une indéniable autorité ; mais c’était une autorité morale acquise par de longs services, par une éminente vertu, par des sacrifices et des labeurs héroïques, par un dévouement patriotique et un zèle apostolique poussés jusqu’à l’effu-

  1. Mémoire du roi, pour servir d’instruction au sieur Talon, 27 mars 1665.