Page:Chapman - Les Fleurs de givre, 1912.djvu/202

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Attelé. Mais à peine a-t-il quitté la foire,
Que le grand altéré de rayons et de gloire
S’élance, renversant soudain dans un fossé
Le véhicule avec le conducteur blessé,
Au milieu d’un épais tourbillon de poussière.

— Cette leçon devra me servir, dit Jean-Pierre,
On ne peut sans péril atteler l’étalon.
Devant faire bientôt un voyage très long,
Conduire des amis très nombreux, je vais mettre
Le poulain — que sans doute aucun n’a pu soumettre —
En avant de mes deux mulets, qu’il aidera…
Au reste, j’en suis sûr, l’âge le calmera. —

Sous son nouveau harnais le griffon se comporte
À merveille d’abord, et lestement emporte
Le coche plein d’amis avec les deux mulets,
Se moquant du fardeau, méprisant les relais.
 
Mais soudain vers l’azur il lève la paupière,
Il reconnaît son champ, son grand champ de lumière,
Il hennit, il bondit, s’écarte du chemin…
Et le voilà courant, dédaigneux de tout frein
Et secouant la plus farouche des crinières…
Les voyageurs, tremblants, aux rênes cramponnés,