Page:Chaptal - Mes souvenirs sur Napoléon.djvu/250

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et des revers là où il n’était pas. Une autre cause devait encore grossir ses succès et diminuer ceux de ses généraux, c’est qu’il osait tout parce qu’il ne dépendait de personne, et qu’il pouvait sacrifier les hommes et le matériel sans crainte de blâme, tandis que ses généraux calculaient les pertes et craignaient toujours d’encourir sa disgrâce, ce qui les rendait craintifs et moins audacieux.

La conduite altière de Napoléon vis-à-vis de ses généraux s’explique d’après des principes ou des propos que je lui ai entendu énoncer bien des fois :

« Je suis arrivé jeune, disait-il, à la tête des armées. Ma première campagne a étonné l’Europe ; l’ineptie du Directoire ne pouvait plus me soutenir au degré où j’étais parvenu. J’entrepris une expédition gigantesque pour occuper les esprits et augmenter ma gloire. Mes anciens se sont perdus dans le repos ou déshonorés dans les revers. Lorsque j’ai vu la France aux abois, je suis revenu et j’ai trouvé le chemin du trône ouvert de toute