Page:Charles Peguy - Cahiers de la Quinzaine 3e serie vol 1-4 - Jaurès -1901.djvu/514

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ainsi, par le lest constant du budget, la fortune de la bourgeoisie livrée à tous les courants du désordre économique. Il lui permet d’entretenir une armée redoutable et onéreuse, qui, dans l’état présent d’antagonisme des classes et de conflit des intérêts, est destinée autant à protéger le capital contre les prolétaires que la nation contre l’étranger. Il lui permet encore d’allouer à des industries, dont les bénéfices sont absorbés par elle, des primes, des subventions, des garanties d’intérêt.

Au moment où nous sommes du développement des États modernes, on peut dire que les deux tiers au moins du budget constituent un budget de classe. Les dépenses vraiment communes et humaines, dépenses pour les travaux publics, pour l’instruction à tous ses degrés, pour l’assistance et l’assurance sociales, ne représentent encore qu’une faible fraction des budgets d’État. Et ce n’est pas seulement par l’affectation des ressources, c’est par la manière de se les procurer que le budget de l’État bourgeois a un caractère de classe. Par les impôts de consommation, une part démesurée des ressources publiques est demandée aux pauvres, aux prolétaires. J’espère donc que l’on ne me soupçonnera pas de considérer l’impôt, au point où nous sommes de l’évolution politique et sociale, comme une première forme du communisme.