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aussi bien que celle du chœur, sont peintes en mosaïque à fond d’or, de manière fort ancienne ; c’est comme si je disois fort méchante. J’ai noté dans le chœur, à gauche, une colonne de porphyre, dont le chapiteau est une jolie danse d’enfants. Au -dehors de l’église, une autre colonne de granit, sur laquelle est une très-belle urne antique, et le prétendu tombeau de la fille de la comtesse Mathilde, lequel, dans le vrai, est un ancien tombeau sur lequel est représentée, en bas-relief, une chasse au sanglier. C’est un des beaux monuments qui restent de la sculpture antique.


On ne peut rien de mieux tourné que le baptistère qui est près de là ; la forme en est rotonde, couverte d’un joli dôme à figure de turban ; l’intérieur est comme celui d’un temple païen, tout vide et n’ayant rien autre chose que deux étages de colonnes. Lorsqu’on parle en dedans, la voix retentit pendant plusieurs secondes comme le son d’une grosse cloche, et le son se dégrade de même peu à peu d’une manière fort amusante. Il y a là un beau tableau des enfants de Zébédée, par Andréa del Sarto.


Le Campo-Santo, ou cimetière, est la troisième pièce, plus singuHère que les deux précédentes. C’est un grand cloître carré long, qui enferme un préau tout de terre apportée de Jérusalem, qui, à ce que l’on prétend, égaie mieux que nulle autre les mânes des pauvres défunts. Le cloître est d’architecture gothique, assez jolie, tout pavé de tombes de marbre, contenant pour la plupart quelque chose de remarque. On a rangé tout le long des murs un grand nombre de tombeaux antiques, lesquels ont donné lieu au savant ouvrage du cardinal Noris, Cenotaphium Pisanum. Il y en a aussi quelques-uns modernes, dont les meilleurs sont ceux du jurisconsulte Decius et de Buoncompagni, oncle du pape Grégoire XIII. Les murs sont tous peints à fresque, de la main du Giotto, d’Orcagna, de Benedetto, etc. (I), qui y ont représenté les histoires de la Bible d’une manière fort bizarre, fort ridicule, parfaitement mauvaise et très-curieuse. Je me souviens d’un iNoë montrant sa nudité, près duquel est une jeune fille qui, se bouchant les yeux avec la

(^) Et surtout de Benozzo Gozzoli.