Page:Charrière - Caliste ou lettres écrites de Lausanne, 1845.djvu/333

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

reux tous les moments de ceux qui l’approchent, car elle voudrait faire le bonheur de leur vie, et les moments font la vie.

« Trop sensible pour être constamment heureuse, ceux qui l’approchent gagnent à ses chagrins. Son existence ne doit pas être inutile, et moins elle lui paraît un bien pour elle-même, plus elle veut la rendre un bien pour eux. »

_______


AU CITOYEN BENJAMIN CONSTANT,
membre du Tribunat.


Il est donc dit que je paierai volontiers, s’il le faut, l’impression des Finck[1]. Un honnête libraire, s’il les vend comme on a vendu Caliste, me rendra de l’argent : du moins je le suppose, quoique cela ne me soit jamais arrivé. Ne pourriez-vous vous adresser à votre collègue Pougens ? Il dit tant de belles phrases, et je suis son abonnée, et il est de l’Institut comme du Tribunat. Peste ! et encore peste ! Il est allé de Colombier à Paris un très joli roman. Un cousin de mademoiselle de Gélieu auquel elle l’a envoyé en avait déjà parlé, avant de l’avoir reçu, à quelques libraires ; on lui avait objecté précisément comme à vous le peu d’étendue. Que cela me paraît bizarre ! Une lecture d’une demi-journée à laquelle on pense le reste du jour, et que l’on n’est pas fâchée de lire le lendemain à ses amis, me paraît ce qu’il y a de plus agréable. Oh ! que j’aurais bien pardonné à madame de Genlis d’avoir laissé de côté son jardin allégorique et toutes ses dissertations ! Je n’ai trouvé de remède à ce que chérissent vos libraires que de le sauter à pieds joints. Si Pougens n’est disposé à me rendre aucun service, je sauterai par-dessus toute sa bibliothèque, car les vers de Legouvé qui a une si grande habitude du théâtre, ceux de Collin d’Harleville qu’on espère y rattacher, sont aussi

  1. Ouvrage de madame de Charrière.