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NOTICE.


Deux ans après, en 1786, madame de Charrière donna son ouvrage le plus connu, Caliste ou Lettres écrites de Lausanne, Il pourrait s’intituler Cécile, à meilleur droit que Caliste ; car Caliste n’y fait qu’épisode, Cécile en est véritablement l’héroïne, comme mademoiselle de La Prise dans le précédent[1]. La mère de Cécile écrit régulièrement à une amie et parente du Languedoc ; elle ne lui parle que de cette chère enfant sans fortune, qui a dix-sept ans déjà et qu’il faut penser à marier : rien de plus gracieux que ces propos d’une mère jeune encore. Elle décrit sa Cécile, ses beautés, sa santé, sa fraîcheur, ses légers défauts même, le cou un peu gros, mais en tout bien du charme. — « Eh bien ! oui. Un joli jeune homme, Savoyard, habillé en fille. C’est assez cela. Mais n’oubliez pas, pour vous la figurer aussi jolie qu’elle l’est, une certaine transparence dans le teint ; je ne sais quoi de satiné, de brillant, que lui donne souvent une légère transpiration ; c’est le contraire du mat, du terne ; c’est le satiné de la fleur rouge des pois odoriférants. » On commence de tous côtés à faire la cour à Cécile ; elle n’a qu’à choisir entre les amants : un cousin ministre, un Bernois de mérite… ; mais, décidément, le préféré de la jeune fille est un petit milord en passage, qui lui fait la cour assez tendrement, mais ne se déclare pas. Tous ces détails de coquetterie innocente, d’émotion naïve, de prudence maternelle et de franchise presque de sœur, sont portés sur un fond de paysage brillant et de légère peinture du monde vaudois. Pas de drame, des situations très simples, et je ne sais quel intérêt attachant. Cécile ne se fait pas illusion ; elle voit bien qu’elle ne remplit

  1. Pour l’entière exactitude bibliographique, je dois dire que le titre de Caliste ou Lettres écrites de Lausanne n’appartient qu’aux éditions postérieures à la première : celle-ci s'intitulent simplement au premier volume Lettres écrites de Lausanne, et au second, Caliste ou Suite des Lettres, etc., etc. ; les deux titres se sont bientôt confondus.