Page:Chassignet - Le mespris de la vie et consolation contre la mort, 1594.djvu/109

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CV.


Plus de l’an jubilé, grand feste des Hebrieus
Le terme s'approchoit, plus l'equitable estime
Des bions s'moindrissoit, & devenoit infime
Le terme estant passé, il se revendoit mieus

Chrestiens mal-avisez plus vous devenez vieus,
Plus le desir d'avoir en vostre ame s'imprime,
Plus la cupidite vous sur-hausse & sublime
Le pris des biens mondains qui vous ferment les cyeus

Les pompes, les grandeurs l'opulence, & la gloire,
Voire le monde mesme est fresle & transitoire,
Et vous avecque luy perirez quelques jours.

O convoitise ardente, ô vanité de l'homme
Que des biens terriens le fol amour consomme
Comme si posseder il les devoit tousjours.


CVI.


Ne fondes point, Mortel, à la terre sujette
A tant de changement le desir de ton cueur
Tousjours l'on abandonne en plus grande languer,
Cela que d'avantage on cherit & on souhaitte

Les biens que tu gaudis, le Seigneur te les preste,
Ils ne sont pas à toy quant il plait au donneur
Tu les redemander, rens luy sans creve-cuer,
Cest le vray creancier qui repete sa dete :

Par ainsi uses en comme t'estant prestez,
Afin de ten servir en tes necessitez
Et tu ne diras point au jour de repentance,

O mort que ta memoire est fascheuse a souffrir
A ceus qui reposans en leur riche opulence
Se donnent du bon-tems, & ne veuillent mourir.