Page:Chateaubriand - Œuvres complètes, éd. Garnier, 1861, tome 3.djvu/577

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Mêler à tes colliers l’anneau de ton esclave,
Toi que je sers, toi que je sers !

Dans les sables mouvants, de ton blanc dromadaire
Je reconnois de loin le pas sûr et léger ;
Tu m’apparois soudain : un astre solitaire
Est moins doux sur la vague au pauvre passager ;
Du matin parfumé le souffle est moins suave,
Le palmier moins charmant au milieu des déserts.
Quel sultan glorieux égale ton esclave.
Toi que je sers, toi que je sers !

Mon pays, que j’aimois jusqu’à l’idolâtrie,
N’est plus dans les soupirs de ma simple chanson ;
Je ne regrette plus ma mère et ma patrie ;
Je crains qu’un prêtre saint n’apporte ma rançon.
Ne m’affranchis jamais ! laisse-moi mon entrave !
Oui, sois ma liberté, mon Dieu, mon univers !
Viens, sous tes beaux pieds nus, viens fouler ton esclave,
Toi que je sers, toi que je sers !


VI.

SOUVENIR DU PAYS DE FRANCE[1].

romance.


Combien j’ai douce souvenance
Du joli lieu de ma naissance !
Ma sœur, qu’ils étoient beaux les jours
De France !
Ô mon pays, sois mes amours
Toujours !

Te souvient-il que notre mère,
Au foyer de notre chaumière,

  1. Cette pièce et les deux suivantes ont été reproduites par Chateaubriand dans les Aventures du dernier Abencerage (Voir p. 126).