Page:Chateaubriand - Œuvres complètes, éd. Garnier, 1861, tome 3.djvu/582

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— Quoi ! ce soir même ? — Oui ! — Cher Valère,
Revenez demain : Nous verrons. »

Gare ! faites place aux carrosses
Où s’enfle l’orgueilleux manant
Qui jadis conduisoit deux rosses
À trente sous, pour le passant.
Le peuple écrasé par la roue
Maudit l’enfant des Percherons ;
Moi, du prince évitant la boue.
Je me range, et dis : Nous verrons.

Nous verrons est un mot magique
Qui sert dans tous les cas fâcheux :
Nous verrons, dit le politique ;
Nous verrons, dit le malheureux.
Les grands hommes de nos gazettes,
Les rois du jour, les fanfarons,
Les faux amis et les coquettes,
Tout cela vous dit : Nous verrons.


X.

PEINTURE DE DIEU.

tirée de l’écriture.


Paris, 1810.


Savez-vous, ô pécheur ! quel est ce Dieu jaloux
Quand l’œuvre de l’impie allume son courroux ?
Sur un char foudroyant il roule dans l’espace ;
La Mort et le Démon volent devant sa face ;
Les trois cieux, dont il fait trembler l’immensité,
S’abaissent sous les pas de son éternité :
Le soleil pâlissant et la lune sanglante
Marchent à la lueur de sa lance brûlante ;
Des gouffres de l’enfer il fait sortir la nuit ;
Il parle, tout se tait ; la mer le voit, et fuit,