Page:Chateaubriand - Œuvres complètes, éd. Garnier, 1861, tome 5.djvu/350

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de sorte qu’un grand nombre de ceux qui avaient entendu la prédication du Sauveur purent en voir l’accomplissement.

Le reste de la nation juive s’étant soulevé de nouveau, Adrien acheva de détruire ce que Titus avait laissé debout dans l’ancienne Jérusalem. Il éleva sur les ruines de la cité de David une autre ville, à laquelle il donna le nom d’ Aelia Capitolina ; il en défendit l’entrée aux Juifs sous peine de mort, et fit sculpter un pourceau sur la porte qui conduisait à Bethléem. Saint Grégoire de Nazianze assure cependant que les Juifs avaient la permission d’entrer à Aelia une fois par an, pour y pleurer ; saint Jérôme ajoute qu’on leur vendait au poids de l’or le droit de verser des larmes sur les cendres de leur patrie.

Cinq cent quatre-vingt-cinq mille Juifs, au rapport de Dion, moururent de la main du soldat dans cette guerre d’Adrien. Une multitude d’esclaves de l’un et de l’autre sexe fut vendue aux foires de Gaza et de Membré ; on rasa cinquante châteaux et neuf cent quatre-vingt-cinq bourgades.

Adrien bâtit sa ville nouvelle précisément dans la place qu’elle : occupe aujourd’hui ; et, par une providence particulière, comme l’observe Doubdan, il enferma le mont Calvaire dans l’enceinte des murailles. A l’époque de la persécution de Dioclétien, le nom même de Jérusalem était si totalement oublié, qu’un martyr ayant répondu à un gouverneur romain qu’il était de Jérusalem, ce gouverneur s’imagina que le martyr parlait de quelque ville factieuse bâtie secrètement par les chrétiens. Vers la fin du VIIe siècle, Jérusalem portait encore le nom d’ Aelia, comme on le voit par le Voyage d’Arculfe, de la rédaction d’Adamannus, ou de celle du vénérable Bède.

Quelques mouvements paraissent avoir eu lieu dans la Judée, sous les empereurs Antonin, Septime Sévère et Caracalla. Jérusalem, devenue païenne dans ses vieilles années, reconnut enfin le Dieu qu’elle avait rejeté. Constantin et sa mère renversèrent les idoles élevées sur le sépulcre du Sauveur, et consacrèrent les saints lieux par des édifices qu’on y voit encore.

Ce fut en vain que Julien, trente-sept ans après, rassembla les Juifs à Jérusalem pour y rebâtir le temple : les hommes travaillaient à cet ouvrage avec des hottes, des bêches et des pelles d’argent ; les femmes emportaient la terre dans le pan de leurs plus belles robes, mais des globes de feu sortant des fondements à demi creusés dispersèrent les ouvriers, et ne permirent pas d’achever l’entreprise.

Nous trouvons une révolte des Juifs sous Justinien, l’an 501 de Jésus-Christ. Ce fut aussi sous cet empereur que l’église de Jérusalem fut élevée à la dignité patriarcale.