Page:Chateaubriand - Œuvres complètes t1.djvu/203

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Je laisse à décider au lecteur , qui , du Tibulle de la France , ou de l’amante de Phaon , a peint la passion avec plus d’ivresse. Les deux poètes semblent avoir fait couler dans leurs vers la flamme de ces soleils sous lesquels ils prirent naissance 1 .

Il eût été curieux de voir comment Alcée, chassé de Mytilène par une révolution, chantoit les malheurs de l’exil et de la tyrannie 2 . Malheureusement il ne nous reste rien de ce poëte.

Le fabuliste Esope fleurissoit aussi dans cet âge célèbre. Passant un jour à Athènes et trouvant les citoyens impatients sous le joug de Pisistrate , il leur dit :

« Les grenouilles, s’ennuyant de leur liberté, demandèrent un roi à Jupiter. Celui-ci se moqua de leur folle prière. Elles redoublèrent d’importunité , et le maître de l’Olympe se vit contraint de céder à leurs clameurs. Il leur jeta donc une poutre qui fit trembler tout le marais dans sa chute. Les grenouilles, muettes de terreur, gardèrent d’abord un profond silence ; ensuite elles osèrent saluer le nouveau prince et s’approcher de lui toutes tremblantes.Bientôt elles passèrent de la crainte à la plus indécente familiarité. Elles sautèrent sur le monarque : insultant à son peu d’esprit et à sa

’ M. de Parny est né à l’île de Bourbon.

2 Horat., lib. ii , Od. xiii.