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MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

nez à nez avec M. d’Andrezel : « Qu’est-ce que cela, monsieur ? me dit le terrible major : vous garderez trois jours les arrêts. » Je fus un peu humilié ; mais je reconnus la vérité du proverbe, qu’à quelque chose malheur est bon ; il me délivra des amours de mon camarade.

Auprès du tombeau de Fénelon, je relus Télémaque : je n’étais pas trop en train de l’historiette philanthropique de la vache et du prélat.

Le début de ma carrière amuse mes ressouvenirs. En traversant Cambrai avec le roi, après les Cent-Jours, je cherchai la maison que j’avais habitée et le café que je fréquentais : je ne les pus retrouver ; tout avait disparu, hommes et monuments.


L’année même où je faisais à Cambrai mes premières armes, on apprit la mort de Frédéric II[1] ; je suis ambassadeur auprès du neveu de ce grand roi, et j’écris à Berlin cette partie de mes Mémoires. À cette nouvelle importante pour le public succéda une autre nouvelle douloureuse pour moi : Lucile m’annonça que mon père avait été emporté d’une attaque d’apoplexie, le surlendemain de cette fête de l’Angevine, une des joies de mon enfance.

Parmi les pièces authentiques qui me servent de guide, je trouve les actes de décès de mes parents. Ces actes marquant aussi d’une façon particulière le décès du siècle, je les consigne ici comme une page d’histoire.

« Extrait du registre de décès de la paroisse de

  1. Frédéric II mourut le 17 août 1786