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MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

vante. — Je lui rendis son salut, et, me retournant de temps en temps, je vis qu’elle me suivoit de la vue aussi longtemps qu’elle pouvoit. »

Bassompierre obtient un rendez vous : « Je trouvai, dit-il, une très belle femme, âgée de vingt ans, qui étoit coiffée de nuit, n’ayant qu’une très fine chemise sur elle et une petite jupe de revesche verte, et des mules aux pieds, avec un peignoir sur elle. Elle me plut bien fort. Je lui demandai si je ne pourrois pas la voir encore une autre fois. — Si vous voulez me voir une autre fois, me répondit-elle, ce sera chez une de mes tantes, qui se tient en la rue Bourg-l’Abbé, proche des Halles, auprès de la rue aux Ours, à la troisième porte du côté de la rue Saint-Martin ; je vous y attendrai depuis dix heures jusqu’à minuit, et plus tard encore ; je laisserai la porte ouverte. À l’entrée, il y a une petite allée que vous passerez vite, car la porte de la chambre de ma tante y répond, et trouverez un degré qui vous mènera à ce second étage. — Je vins à dix heures, et trouvai la porte qu’elle m’avoit marquée, et de la lumière bien grande, non seulement au second étage, mais au troisième et au premier encore ; mais la porte était fermée. Je frappai pour avertir de ma venue ; mais j’ouïs une voix d’homme qui me demanda qui j’étois. Je m’en retournai à la rue aux Ours, et étant retourné pour la deuxième fois, ayant trouvé la porte ouverte, j’entrai jusques au second étage, où je trouvai que cette lumière étoit la paille du lit que l’on y brûloit, et deux corps nus étendus sur la table de la chambre. Alors, je me retirai bien étonné, et en sortant je rencontrai des corbeaux (enterreurs de morts) qui me demandè-