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MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

vaincu d’être un pauvre homme. On parlait encore de Robertson[1], parce qu’il était sec.

Pour ce qui regarde les poètes, les elegant Extracts servaient d’exil à quelques pièces de Dryden ; on ne pardonnait point aux rimes de Pope, bien qu’on visitât sa maison à Twickenham et que l’on coupât des morceaux du saule pleureur planté par lui, et dépéri comme sa renommée.

Blair[2] passait pour un critique ennuyeux à la française : on le mettait bien au-dessous de Johnson[3]. Quant au vieux Spectator[4], il était au grenier.

Les ouvrages politiques anglais ont peu d’intérêt pour nous. Les traités économiques sont moins circonscrits ; les calculs sur la richesse des nations, sur l’emploi des capitaux, sur la balance du commerce, s’appliquent en partie aux sociétés européennes.

Burke[5] sortait de l’individualité nationale poli-

  1. Le Dr William Robertson (1721-1793). On lui doit une Histoire d’Écosse pendant les règnes de la reine Marie et du roi Jacques VI jusqu’à son avènement au trône d’Angleterre ; une Histoire d’Amérique et une Histoire de Charles-Quint, avec une Esquisse de l’état politique et social de l’Europe, au temps de son avènement.
  2. Hugues Blair (1718-1801). Il avait publié, en 1783, un cours de rhétorique et de belles-lettres.
  3. Samuel Johnson (1709-1784). Son Dictionnaire anglais (1755) est resté classique.
  4. Le Spectator, fondé en 1711, par Steele et Addison, a paru pendant deux ans, de janvier 1711 à décembre 1712. Cette feuille était censée rédigée par les membres d’un club, dont le Spectateur n’était que le secrétaire. Parmi les personnages ainsi inventés se trouvait un sir Roger de Caverley, type du bon vieux gentilhomme campagnard, qu’Addison adopta et qui devint, sous sa plume, un personnage exquis.
  5. Edmond Burke (1730-1797). Quoique le principal orateur du parti whig, il se prononça avec ardeur contre la Révolution