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MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

particulières à des individus ou à des corps, alors même qu’elles sont honorables.

Le décret du 29 septembre, pour le règlement des sociétés populaires, ne servit qu’à les rendre plus violentes. Ce fut le dernier acte de l’Assemblée constituante ; elle se sépara le lendemain, et laissa à la France une révolution.


ASSEMBLÉE LÉGISLATIVE — CLUBS.

L’Assemblée législative installée le 1er octobre 1791, roula dans le tourbillon qui allait balayer les vivants et les morts. Des troubles ensanglantèrent les départements ; à Caen, on se rassasia de massacres et l’on mangea le cœur de M. de Belsunce[1].

Le roi apposa son veto au décret contre les émigrés et à celui qui privait de tout traitement les ecclésiastiques non assermentés. Ces actes légaux augmentèrent l’agitation. Petion était devenu maire de Paris[2]. Les députés décrétèrent d’accusation, le 1er janvier 1792, les princes émigrés ; le 2, ils fixèrent à ce

  1. Le comte de Belsunce, major en second du régiment de Bourbon Infanterie. « À partir du 14 juillet, dit M. Taine, dans chaque ville, les magistrats se sentent à la merci d’une bande de sauvages, parfois d’une bande de cannibales. Ceux de Troyes viennent de torturer Huez (le maire de la ville) à la manière des Hurons ; ceux de Caen ont fait pis : le major de Belsunce, non moins innocent et garanti par la foi jurée, a été dépecé comme Lapérouse aux îles Fidji, et une femme a mangé son cœur. » La Révolution, tome I, p. 89.
  2. Jérôme Petion de Villeneuve (1756-1794), député aux États-Généraux et membre de la Convention. Le 17 novembre 1791, il fut élu maire, en remplacement de Bailly, par 6 708 voix, alors que le nombre des électeurs était de 80 000. Il avait pour concurrent La Fayette.