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MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

de Bonaparte, il fallait violer le territoire de l’Allemagne, et le territoire fut immédiatement violé. Le duc d’Enghien fut arrêté à Ettenheim. On ne trouva auprès de lui, au lieu du général Dumouriez, que le marquis de Thumery et quelques autres émigrés de peu de renom : cela aurait dû avertir de la méprise. Le duc d’Enghien est conduit à Strasbourg. Le commencement de la catastrophe de Vincennes nous a été raconté par le prince même : il a laissé un petit journal de route d’Ettenheim à Strasbourg : le héros de la tragédie vient sur l’avant-scène prononcer ce prologue :

journal du duc d’enghien.

« Le jeudi 15 mars, à Ettenheim, ma maison cernée, dit le prince, par un détachement de dragons et des piquets de gendarmerie, total, deux cents hommes environ, deux généraux, le colonel des dragons, le colonel Charlot de la gendarmerie de Strasbourg, à cinq heures (du matin). À cinq heures et demie, les portes enfoncées, emmené au Moulin, près la Tuilerie. Mes papiers enlevés, cachetés. Conduit dans une charrette, entre deux haies de fusiliers, jusqu’au Rhin. Embarqué pour Rhisnau. Débarqué et marché à pied jusqu’à Pfortsheim. Déjeuné à l’auberge. Monté en voiture avec le colonel Charlot, le maréchal des logis de la gendarmerie, un gendarme sur le siège et Grunstein. Arrivé à Strasbourg, chez le colonel Charlot, vers cinq heures et demie. Transféré une demi-heure après, dans un fiacre, à la citadelle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .