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MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

il un traître ? La liberté américaine était-elle moins honorable parce qu’elle a été assistée par La Fayette et conquise par des grenadiers français ? Tout gouvernement qui, au lieu d’offrir des garanties aux lois fondamentales de la société, transgresse lui-même les lois de l’équité, les règles de la justice, n’existe plus et rend l’homme à l’état de nature. Il est licite alors de se défendre comme on peut, de recourir aux moyens qui semblent les plus propres à renverser la tyrannie, à rétablir les droits de chacun et de tous. »

Les principes du droit naturel, mis en avant par les plus grands publicistes, développés par un homme tel que M. de Malesherbes, et appuyés de nombreux exemples historiques, me frappèrent sans me convaincre : je ne cédai réellement qu’au mouvement de mon âge, au point d’honneur. — J’ajouterai à ces exemples de M. de Malesherbes des exemples récents : pendant la guerre d’Espagne, en 1823, le parti républicain français est allé servir sous le drapeau des Cortès, et ne s’est pas fait scrupule de porter les armes contre sa patrie ; les Polonais et les Italiens constitutionnels ont sollicité, en 1830 et 1831, les secours de la France, et les Portugais de la charte ont envahi leur patrie avec l’argent et les soldats de l’étranger. Nous avons deux poids et deux mesures : nous approuvons, pour une idée, un système, un intérêt, un homme, ce que nous blâmons pour une autre idée, un autre système, un autre intérêt, un autre homme[1].

    le 6 février 1778, avec le cabinet de Versailles, deux traités, l’un de commerce et de neutralité, l’autre d’alliance défensive. — Silas Deane mourut à Paris, en 1789, dans la plus profonde misère.

  1. Dans l’Essai sur les Révolutions, sous ce titre : Un mot sur