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MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

ceau des Israélites et de la patrie des chrétiens me remplit de joie et de respect. J’allais descendre sur la terre des prodiges, aux sources de la plus étonnante poésie, aux lieux où, même humainement parlant, s’est passé le plus grand événement qui ait jamais changé la face du monde.

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« Le vent nous manqua à midi ; il se leva de nouveau à quatre heures ; mais, par l’ignorance du pilote, nous dépassâmes le but… À deux heures de l’après-midi, nous revîmes Jaffa.

« Un bateau se détacha de la terre avec trois religieux. Je descendis avec eux dans la chaloupe ; nous entrâmes dans le port par une ouverture pratiquée entre des rochers, et dangereuse même pour un caïque.

« Les Arabes du rivage s’avancèrent dans l’eau jusqu’à la ceinture, afin de nous charger sur leurs épaules. Il se passa, là, une scène assez plaisante : mon domestique était vêtu d’une redingote blanchâtre ; le blanc étant la couleur de distinction chez les Arabes, ils jugèrent que Julien était le scheik. Ils se saisirent de lui et l’emportèrent en triomphe, malgré ses protestations, tandis que, grâce à mon habit bleu, je me sauvais obscurément sur le dos d’un mendiant déguenillé. »

Maintenant, entendons Julien, principal acteur de la scène :


ITINÉRAIRE DE JULIEN.

« Ce qui m’a beaucoup étonné, c’est de voir venir six Arabes pour me porter à terre, tandis qu’il n’y