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MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

fermé au Temple le 13, surlendemain du massacre des Suisses. Dans ce brevet il est dit que la nomination du 30 août comptera à l’officier promu à partir du 6 février précédent.

Les infortunés sont souvent prophètes ; mais cette fois la prévision du martyr n’était pour rien dans la gloire future de Napoléon. Il existe encore dans les bureaux de la guerre des brevets en blanc, signés d’avance par Louis XVI ; il n’y reste à remplir que les vides d’attente ; de ce genre aura été la commission précitée. Louis XVI, renfermé au Temple, à la veille de son procès, au milieu de sa famille captive, avait autre chose à faire que de s’occuper de l’avancement d’un inconnu.

L’époque du brevet se fixe par le contre-seing ; ce contre-seing est : Servan. Servan, nommé au département de la guerre le 8 mai 1792, fut révoqué le 13 juin même année ; Dumouriez eut le portefeuille jusqu’au 18 ; Lajard prit à son tour le ministère jusqu’au 23 juillet ; d’Abancourt lui succéda jusqu’au 10 août, jour que l’Assemblée nationale rappela Servan, lequel donna sa démission le 3 octobre. Nos ministères étaient alors aussi difficiles à compter que le furent depuis nos victoires.

Le brevet de Napoléon ne peut être du premier ministère de Servan, puisque la pièce porte la date du 30 août 1792 ; il doit être de son second ministère ; cependant il existe une lettre de Lajard, du 12 juillet, adressée au capitaine d’artillerie Bonaparte[1]. Expliquez

  1. Voir cette lettre de Lajard et les explications dont M. Frédéric Masson l’accompagne, au tome II, page 400, de Napoléon inconnu.