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MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

la meilleure source d’instruction : l’auteur est d’autant plus croyable, qu’il a fait preuve d’études dans son Traité de la grande tactique et dans son Traité des grandes opérations militaires. Admirateur de Napoléon jusqu’à l’injustice, attaché à l’état-major du maréchal Ney, on a de lui l’histoire critique et militaire des campagnes de la Révolution ; il a vu de ses propres yeux la guerre en Allemagne, en Prusse, en Pologne et en Russie jusqu’à la prise de Smolensk ; il était présent en Saxe aux combats de 1813 ; de là il passa aux alliés ; il fut condamné à mort par un conseil de guerre de Bonaparte, et nommé au même moment aide de camp de l’empereur Alexandre. Attaqué par le général Sarrazin[1], dans son Histoire de la guerre de Russie et d’Allemagne, Jomini lui répliqua. Jomini a eu à sa disposition les matériaux déposés au ministère de la guerre et aux autres archives de royaume ; il a contemplé à l’envers la marche rétrograde de nos armées,

    in-8o) ; la Vie politique et militaire de l’empereur Napoléon, racontée par lui-même au tribunal de César, d’Alexandre et de Frédéric (1827).

  1. Jean Sarrazin (1770-1840). À la suite de négociations secrètes avec les Anglais, en 1809, le général Sarrazin fut condamné à mort par contumace et passa à l’étranger. Il servit en Espagne contre les Français. À l’époque des Cent Jours, il eut l’audace d’offrir ses services à Napoléon, qui le fit arrêter. En 1814, il avait recouvré son grade de maréchal de camp ; mais en 1817, une ordonnance royale lui retira son grade et sa pension. L’année suivante, il fut traduit devant la cour d’assises de la Seine sous l’inculpation de trigamie et condamné à dix ans de travaux forcés et au carcan. Au bout de trois ans, il fut gracié par Louis XVIII et s’embarqua pour Lisbonne : il n’a plus reparu en France. En 1815, il avait publié une Histoire de la guerre de Russie et d’Allemagne, bientôt suivie d’un autre écrit intitulé : Correspondance entre le général Jomini et le général Sarrazin.