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MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

cours d’eau qui se jettent dans le Volga ; né pour Babylone, il l’avait déjà tentée par une autre route. Arrêté à Jaffa à l’entrée occidentale de l’Asie, arrêté à Moscou à la porte septentrionale de cette même Asie, il vint mourir dans les mers qui bordent cette partie du monde d’où se levèrent l’homme et le soleil.

Napoléon, au milieu de la nuit, fit appeler un de ses aides de camp ; celui-ci le trouva la tête appuyée dans ses deux mains : « Qu’est-ce que la guerre ? » disait-il ; « un métier de barbares où tout l’art consiste à être le plus fort sur un point donné[1] ». Il se plaint de l’inconstance de la fortune ; il envoie examiner la position de l’ennemi ; on lui rapporte que les feux brillent du même éclat et en égal nombre ; il se tranquillise. À cinq heures du matin, Ney lui envoie demander l’ordre d’attaque ; Bonaparte sort et s’écrie : « Allons ouvrir les portes de Moscou. » Le jour paraît ; Napoléon montrant l’Orient qui commençait à rougir : « Voilà le soleil d’Austerlitz ! » s’écria-t-il.

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« Le 6, à deux heures du matin, l’empereur parcourut les avant-postes ennemis : on passa la journée à se reconnaître. L’ennemi avait une position très resserrée.

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« Cette position parut belle et forte. Il était facile de manœuvrer et d’obliger l’ennemi à l’évacuer ; mais cela aurait remis la partie

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« Le 7, à six heures du matin, le général comte Sorbier, qui avait armé la batterie droite avec l’artillerie de la réserve de la garde, commença le feu.

  1. Ségur, livre VII, chap. VIII.