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MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

néraire de Napoléon de Fontainebleau à l’île d’Elbe. Cette brochure et celle de l’abbé de Pradt sur l’ambassade de Pologne sont les deux comptes rendus dont Napoléon a été le plus affligé. Il regrettait sans doute alors le temps de sa libérale censure, quand il faisait fusiller le pauvre Palm, libraire allemand, pour avoir distribué à Nuremberg l’écrit de M. de Gentz : L’Allemagne dans son profond abaissement[1]. Nuremberg, à l’époque de la publication de cet écrit, étant encore ville libre, n’appartenait point à la France : Palm n’aurait-il pas dû deviner cette conquête !

Le comte de Waldbourg fait d’abord le récit de plusieurs conversations qui précédèrent à Fontainebleau le départ. Il rapporte que Bonaparte donnait les plus grands éloges à lord Wellington et s’informait de son caractère et de ses habitudes. Il s’excusait de n’avoir pas fait la paix à Prague, à Dresde et à Francfort ; il convenait qu’il avait eu tort, mais qu’il avait alors d’autres vues. « Je n’ai point été usurpateur, ajoutait-il, parce que je n’ai accepté la couronne que d’après le vœu unanime de la nation, tandis que Louis XVIII l’a usurpée, n’étant appelé au trône que par un vil Sénat, dont plus de dix membres ont voté la mort de Louis XVI. »

Le comte de Waldbourg poursuit ainsi son récit :

« L’empereur se mit en route, avec ses quatre autres voitures, le 21 vers midi, après avoir eu encore avec le général Koller un long entretien dont voici

  1. La famille du malheureux libraire a publié à Nuremberg, en 1814, un livre qui raconte de la manière la plus complète et la plus saisissante le procès et l’exécution de Johann Philipp Palm. Cet épisode eut dans toute l’Allemagne un retentissement considérable.