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MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

verneur de Paris lors de la mort du duc d’Enghien, il gémit tout bas d’un assassinat qu’il n’eut pas le courage de blâmer tout haut.

Beau-frère de Napoléon[1] et maréchal de l’empire, Murat entra à Vienne en 1805[2] ; il contribua aux victoires d’Austerlitz, d’Iéna, d’Eylau et de Friedland, devint grand-duc de Berg[3] et envahit l’Espagne en 1808.

Napoléon le rappela et lui donna la couronne de Naples. Proclamé roi des Deux-Siciles le 1er  août 1808, il plut aux Napolitains par son faste, son costume théâtral, ses cavalcades et ses fêtes.

Appelé en qualité de grand vassal de l’empire à l’invasion de la Russie, il reparut dans tous les combats et se trouva chargé du commandement de la retraite de Smolensk à Wilna. Après avoir manifesté son mécontentement, il quitta l’armée à l’exemple de Bonaparte, et vint se réchauffer au soleil de Naples, comme son capitaine au foyer des Tuileries. Ces hommes de triomphe ne pouvaient s’accoutumer aux revers. Alors commencèrent ses liaisons avec l’Autriche. Il reparut encore aux camps de l’Allemagne en 1813, retourna à Naples après la perte de la bataille de Leipzig et renoua ses négociations austro-britanniques. Avant d’entrer dans une alliance complète, Murat écrivit à Napoléon une lettre que j’ai entendu lire à M. de Mosbourg[4] : il disait à son beau-frère,

  1. Il avait épousé Caroline Bonaparte le 20 janvier 1800.
  2. Le 13 novembre 1805.
  3. Le 15 mars 1806.
  4. Jean-Michel-Laurent Agar, comte de Mosbourg (1771-1844) était un compatriote et un camarade d’études de Murat, qui l’attacha à sa fortune, l’appela en 1806 au ministère des