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MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

l’affluence des étrangers protestants à Rome : leur présence fait du bien au pays ; mais elle est bonne encore sous un autre rapport : les Anglais arrivent ici avec les plus étranges notions sur le pape et la papauté, sur le fanatisme du clergé, sur l’esclavage du peuple dans ce pays : ils n’y ont pas séjourné deux mois qu’ils sont tout changés. Ils voient que je ne suis qu’un évêque comme un autre évêque, que le clergé romain n’est ni ignorant ni persécuteur, et que mes sujets ne sont pas des bêtes de somme. »

« Encouragé par cette espèce d’effusion du cœur et cherchant à élargir le cercle de la conversation, j’ai dit au souverain pontife : « Votre Sainteté ne penserait-elle pas que le moment est favorable à la recomposition de l’unité catholique, à la réconciliation des sectes dissidentes, par de légères concessions sur la discipline ? Les préjugés contre la cour de Rome s’effacent de toutes parts, et, dans un siècle encore ardent, l’œuvre de la réunion avait déjà été tentée par Leibnitz et Bossuet. »

« — Ceci est une grande chose, m’a dit le pape ; mais je dois attendre le moment fixé par la Providence. Je conviens que les préjugés s’effacent ; la division des sectes en Allemagne a amené la lassitude de ces sectes. En Saxe, où j’ai résidé trois ans, j’ai le premier fait établir un hôpital des enfants trouvés et obtenu que cet hôpital serait desservi par des catholiques. Il s’éleva alors un cri général contre moi parmi les protestants ; aujourd’hui ces mêmes protestants sont les premiers à applaudir à l’établissement et à le doter. Le nombre des catho-