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MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

À MADAME RÉCAMIER.
« Rome, mardi 13 janvier 1829.

« Hier au soir je vous écrivais à huit heures la lettre que M. du Viviers[1] vous porte ; ce matin, à mon réveil, je vous écris encore par le courrier ordinaire qui part à midi. Vous connaissez les pauvres dames de Saint-Denis : elles sont bien abandonnées depuis l’arrivée des grandes dames de la Trinité-du-Mont ; sans être l’ennemi de celles-ci, je me suis rangé avec madame de Ch… du côté du faible. Depuis un mois les dames de Saint-Denis voulaient donner une fête à M. l’ambassadeur et à madame l’ambassadrice : elle a eu lieu hier à midi. Figurez-vous un théâtre arrangé dans une espèce de sacristie qui avait une tribune sur l’église ; pour acteurs une douzaine de petites filles, depuis l’âge de huit ans jusqu’à quatorze ans, jouant les Machabées. Elles s’étaient fait elles-mêmes leurs casques et leurs manteaux. Elles déclamaient leurs vers français avec une verve et un accent italien le plus drôle du monde ; elles tapaient du pied dans les moments énergiques ; il y avait une nièce de Pie VII,

    qu’on avait crue conjurée reprit le dessus. Il donna sa démission. Une ordonnance rendue le 4 janvier, sans le remplacer au Conseil, confia l’intérim du ministère des Affaires étrangères à M. Portalis, garde des sceaux. M. de Rayneval, qui déjà avait remplacé M. de la Ferronays pendant son congé, restait chargé de la direction du ministère.

  1. M. du Viviers était un des attachés de l’ambassade ; en même temps que la lettre à Mme  Récamier, il portait à Paris le récit de la conversation que Chateaubriand avait eue avec le pape.