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MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

votre courage, à votre amour de la France. Comme vous, je déteste le joug étranger : s’il s’agissait de défendre mon pays, je ne demanderais pas à porter la lyre du poète, mais l’épée du vétéran dans les rangs de vos soldats.

« Je n’ai point encore lu, monsieur, vos réflexions ; mais si l’état de la politique vous conduisait à retirer la proposition qui m’a si étrangement affligé, avec quel bonheur je me rencontrerais près de vous, sans obstacle, sur le terrain de la liberté, de l’honneur, de la gloire de notre patrie !

« J’ai l’honneur d’être, monsieur, avec la considération la plus distinguée, votre très-humble et très-obéissant serviteur,

« Chateaubriand. »
Paris, rue d’Enfer, infirmerie de Marie-Thérèse, décembre 1831.

Un poète, mêlant les proscriptions des Muses à celles des lois, dans une improvisation énergique, attaqua la veuve et l’orphelin. Comme ces vers étaient d’un écrivain de talent, ils acquirent une sorte d’autorité qui ne me permit pas de les laisser passer ; je fis volte-face contre un autre ennemi[1].

On ne comprendrait pas ma réponse si on ne lisait le libellé du poète[2] ; je vous invite donc à jeter les

  1. M. Barthélémy a passé depuis au juste-milieu, non sans force imprécations de beaucoup de gens qui se sont ralliés seulement un peu plus tard. (Note de Paris, 1837.) Ch.
  2. Les vers de Barthélémy parurent le 6 novembre 1831. Ils forment la XXXIe livraison de la Némésis. Pendant toute une année, du 1er  mars 1831 au 1er  avril 1832, Barthélémy soutint cette gageure de publier chaque semaine une satire politique de plusieurs centaines de vers, tous d’une facture irréprochable et d’une richesse de rimes que Victor Hugo lui-même ne devait pas