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MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

Infidèle à son extraction populaire, la révolution sortie des journées de Juillet a répudié la gloire et courtisé la honte. Excepté dans quelques cœurs dignes de lui donner asile, la liberté, devenue l’objet de la dérision de ceux qui en faisaient leur cri de ralliement, cette liberté que des bateleurs se renvoient à coups de pied, cette liberté étranglée après flétrissure au tourniquet des lois d’exception, transformera, par son anéantissement, la révolution de 1830 en une cynique duperie.

Là-dessus, et pour nous délivrer tous, madame la duchesse de Berry est arrivée. La fortune l’a trahie ; un juif l’a vendue ; un ministre l’a achetée. Si l’on ne veut pas agir contre elle par mesure de police, il ne reste plus qu’à la traduire en cour d’assises. Je le suppose ainsi, et j’ai mis en scène le défenseur de la princesse ; puis, après avoir fait parler le défenseur, je m’adresse à l’accusateur :

« Avocat, levez-vous :

« Établissez doctement que Caroline-Ferdinande de Sicile, veuve de Berry, nièce de feu Marie-Antoinette d’Autriche, veuve Capet, est coupable de réclamation envers un homme réputé oncle et tuteur d’un orphelin nommé Henri ; lequel oncle et tuteur serait, selon le dire calomnieux de l’accusée, détenteur de la couronne d’un pupille, lequel pupille prétend impudemment avoir été roi depuis le jour de l’abdication du ci-devant Charles X, et de l’ex-dauphin, jusqu’au jour de l’élection du roi des Français.

« À l’appui de votre plaidoirie, que les juges fassent comparaître d’abord Louis-Philippe comme témoin à charge ou à décharge, si mieux n’aime se récuser