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MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

j’y ai été reçu à merveille ; j’ai trouvé un gouvernement plein de tolérance et fort instruit des affaires hors de l’Italie, mais enfin rien ne me plaît plus que l’idée de disparaître entièrement de la scène du monde : il est bon de se faire précéder dans la tombe du silence que l’on y trouvera.

« Je vous remercie d’avoir bien voulu me parler de vos travaux. Vous ferez un ouvrage digne de vous et qui augmentera votre renommée[1]. Si vous aviez quelques recherches à faire ici, soyez assez bon pour me les indiquer : une fouille au Vatican pourrait vous fournir des trésors. Hélas ! je n’ai que trop vu ce pauvre M. Thierry ! je vous assure que je suis poursuivi par son souvenir : si jeune, si plein de l’amour de son travail, et s’en aller ! et, comme il arrive toujours au vrai mérite, son esprit s’améliorait et la raison prenait chez lui la place du système : j’espère encore un miracle. J’ai écrit pour lui ; on ne m’a pas même répondu. J’ai été plus heureux pour vous, et une lettre de M. de Martignac me fait enfin espérer que justice, bien que tardive et incomplète, vous sera faite. Je ne vis plus, monsieur, que pour mes amis ; vous me permettrez de vous mettre au nombre de ceux qui me restent. Je demeure, monsieur, avec autant de sincérité que d’admiration, votre plus dévoué serviteur[2].

« Chateaubriand. »
  1. Villemain préparait alors son Histoire de Grégoire VII, célèbre avant de paraître, tombée dans l’oubli, aussitôt qu’elle eût paru, — ce qui n’eut lieu du reste qu’en 1873, trois ans après la mort de l’auteur.
  2. Grâce à Dieu, M. Thierry est revenu à la vie et il a repris