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MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

veux pas plus parler que de Jemmapes : j’aurais peur d’y trouver une couronne.

Châlons m’a rappelé une grande faiblesse de Bonaparte ; il y exila la beauté[1]. Paix à Châlons qui me dit que j’ai encore des amis.

À Château-Thierry j’ai trouvé mon dieu, La Fontaine. C’était l’heure du salut : la femme de Jean n’y était plus, et Jean était retourné chez madame de la Sablière.

En rasant le mur de la cathédrale de Meaux, j’ai répété à Bossuet ses paroles : « L’homme arrive au tombeau traînant après lui la longue chaîne de ses espérances trompées. »

À Paris j’ai passé les quartiers habités par moi avec mes sœurs dans ma jeunesse ; ensuite le Palais de jus-

    raines, le Dr Bonnet de Malherbe, l’un des collaborateurs de Carrel au National, a été, comme de raison, beaucoup moins discret que Sainte-Beuve : « Lorsqu’il était sous-lieutenant dans un régiment d’infanterie, écrit M. de Malherbe, Carrel était devenu l’amant de la femme d’un de ses chefs de bataillon, avec lequel cette irrégularité lui valut, lorsqu’il eut quitté le service, un duel. Cette liaison devint bientôt une chaîne, à laquelle Carrel fut rivé jusqu’à la fin de ses jours et qui eut une grande influence sur sa destinée. Après la révolution de Juillet, on lui offrit la préfecture du Cantal… Quelque maigre que put sembler la pitance à l’ancien collègue de MM. Thiers et Mignet, Carrel ne refusa pas et il se disposait à se rendre à son poste, lorsqu’il reçut la visite d’un ambassadeur officieux que M. Guizot, ministre de l’intérieur, lui envoyait pour lui faire quelques observations au sujet de son intérieur, dont le ministre avait été informé, et lui faire comprendre qu’il devait aller seul prendre la direction administrative qui lui était confiée. Carrel éconduisit l’ambassadeur sans avoir donné de réponse positive ; mais, après en avoir conféré avec la personne intéressée, il notifia au ministre un refus très net. »

  1. Sur l’exil de Mme Récamier à Châlons, voir tome IV. page 420 (Livre XI de la Troisième Partie).