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MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

moins essayer, par le seul moyen qui me reste, de vous remettre la commission que je voulais vous donner et que vous accomplirez : car je compte sans réserve sur votre dévouement pour mon fils. Je vous charge donc, monsieur, spécialement d’aller à Prague et de dire à mes parents que, si je me suis refusée jusqu’au 22 février à déclarer mon mariage secret, ma pensée était de servir davantage la cause de mon fils et de prouver qu’une mère, une Bourbon, ne craignait pas d’exposer ses jours. Je comptais seulement faire connaître mon mariage à la majorité de mon fils ; mais les menaces du gouvernement, les tortures morales, poussées au dernier degré, m’ont décidée à faire ma déclaration. Dans l’ignorance où je suis de l’époque à laquelle la liberté me sera rendue, après tant d’espérances déçues, il est temps de donner à ma famille et à l’Europe entière une explication qui puisse prévenir des suppositions injurieuses. J’aurais désiré pouvoir la donner plus tôt ; mais une séquestration absolue et les difficultés insurmontables pour communiquer avec le dehors m’en avaient empêchée jusqu’ici. Vous direz à ma famille que je suis mariée en Italie au comte Hector Lucchesi-Palli, des princes de Campo-Franco.

« Je vous demande, ô monsieur de Chateaubriand, de porter à mes chers enfants l’expression de toute ma tendresse pour eux. Dites bien à Henri que je compte plus que jamais sur tous ses efforts pour devenir de jour en jour plus digne de l’admiration et de l’amour des Français. Dites à Louise combien je serais heureuse de l’embrasser et que ses lettres