par elle-même, elle l’est par les révolutions au milieu desquelles le hasard l’a placée. Le porteur de cette renommée, à force d’être, se mêle à tout ; son nom devient l’enseigne ou le drapeau de tout : M. de La Fayette sera éternellement la garde nationale. Par un effet extraordinaire, le résultat de ses actions était souvent en contradiction avec ses pensées ; royaliste, il renversa en 1789 une royauté de huit siècles ; républicain, il créa en 1830 la royauté des barricades : il s’en est allé donnant à Philippe la couronne qu’il avait enlevée à Louis XVI. Pétri avec les événements, quand les alluvions de nos malheurs se seront consolidées, on retrouvera son image incrustée dans la pâte révolutionnaire.
Son ovation aux États-Unis[1] l’a singulièrement rehaussé : un peuple, en se levant pour le saluer, l’a couvert de l’éclat de sa reconnaissance. Everett[2] termine par cette apostrophe le discours qu’il prononça en 1824 :
« Sois le bienvenu sur nos rives, ami de nos pères ! Jouis d’un triomphe tel qu’il ne fut jamais le partage d’aucun monarque ou conquérant de la terre. Hélas ! Washington, l’ami de votre jeunesse, celui qui fut plus que l’ami de son pays, gît tranquille dans le sein de la terre qu’il a rendue libre. Il repose dans la paix et dans la gloire sur les rives du
- ↑ Son mandat législatif n’ayant pas été renouvelé en 1824, La Fayette profita de ce repos forcé pour visiter encore une fois l’Amérique : ce dernier voyage dura quatorze mois.
- ↑ Edward Everett (1794-1865), homme politique et publiciste américain. On a de lui Orations and speeches on various occasions, Boston, 1826-1856, trois volumes in-8o. Il fut élu, en 1858, membre correspondant de l’Institut de France.