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MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

comte de Nesselrode, et que le chef de la religion grecque ne voit en effet aucun intérêt pour sa politique à soutenir par des moyens efficaces la cause de ses coreligionnaires.

« Je n’ai point trouvé que le mécontentement que le comte de Nesselrode m’a témoigné du retard que l’Autriche et l’Angleterre apportaient à répondre à son mémoire fût exprimé avec franchise et vérité ; il semblait que ce qu’il me disait à ce sujet fît partie d’un rôle étudié ; qu’il avait en quelque sorte compté sur le peu d’empressement dont il se plaignait et qui semblait cependant déjouer ses plans. Tout semble indiquer que le mémoire qu’il a fait faire, et dont le succès a été si général, n’était qu’un acquit de conscience, l’exécution de l’engagement qu’il avait pris à Czernowitz, et que l’auteur a toujours été convaincu, ainsi que l’Autriche et l’Angleterre, que cette pièce diplomatique ne serait suivie d’aucun résultat, qu’elle resterait dans les archives impériales et dans celles de tous les cabinets de l’Europe comme un stérile monument de ce que l’on est convenu de nommer magnanimité de l’empereur, et un éloquent témoignage de son facile désintéressement.

« Il ne faut donc pas nous étonner si notre empressement à nous rendre à l’invitation du cabinet russe, si la bonne foi avec laquelle nous nous sommes montrés disposés à donner immédiatement suite aux idées soumises par la Russie, et que nous avons cru aussi franchement proposées qu’elles semblaient conçues avec générosité, ne nous ont pas valu plus de témoignages de reconnaissance. Vous