ses derniers jours dans un dernier exil, avec le petit-fils dont le père avait été assassiné et de qui la mère était captive. Charles X, pour rompre ce silence, m’adressa quelques questions. Alors j’expliquai brièvement l’objet de mon voyage : je me dis porteur d’une lettre de madame la duchesse de Berry, adressée à madame la dauphine, dans laquelle la prisonnière de Blaye confiait le soin de ses enfants à la prisonnière du Temple, comme ayant la pratique du malheur. J’ajoutai que j’avais aussi une lettre pour les enfants. Le roi me répondit : « Ne la leur remettez pas ; ils ignorent en partie ce qui est arrivé à leur mère ; vous me donnerez cette lettre. Au surplus, nous parlerons de tout cela demain à deux heures : allez vous coucher. Vous verrez mon fils et les enfants à onze heures et vous dînerez avec nous. » Le roi se leva, me souhaita une bonne nuit et se retira.
Je sortis ; je rejoignis M. de Blacas dans le salon d’entrée ; le guide m’attendait sur l’escalier. Je retournai à mon auberge, descendant les rues sur les pavés glissants, avec autant de rapidité que j’avais mis de lenteur à les monter.
Le lendemain, 25 mai, je reçus la visite de M. le comte de Cossé, logé dans mon auberge. Il me raconta les brouilleries du château relatives à l’éducation du duc de Bordeaux. À dix heures et demie je montai à Hradschin ; le duc de Guiche[1] m’introduisit chez M. le
- ↑ Né au château de Versailles, le duc de Guiche, fils du duc de Gramont, capitaine des gardes-du-corps du Roi, était à peine âgé de trois semaines, lorsqu’il suivit sa famille en émigration, parcourant successivement avec elle toutes les contrées de l’Eu-