Page:Chatelain - Beautés de la poésie anglaise, tome 1, 1860.djvu/18

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pas là du Fair Play, et j’en reviens à mon dire : Vous êtes fou, ou bien outrecuidant, si vous ne réunissez en votre chère personne, ce qui serait pis encore, ces deux qualités négatives.

L’Éditeur. — Critique ! mon respectable ami, je crois n’être ni fou, ni outrecuidant ; toutefois si par hazard je pouvais consentir à plaider Guilty sur le premier chef, je plaiderais certainement not Guilty sur le second. J’ai voulu présenter moins au public Anglais qui connaît mieux que moi les chefs-d’œuvre de ses poètes, qu’au public at large, au public du Continent, mes « Beautés, » dans leur costume primitif, c’est-à-dire, dans ma pensée, dans le seul costume où elles sont réellement belles. Mais nombre de Publishers, et quelques auteurs m’ont refusé la permission de faire paraître ces belles Dames dans le costume primitif, qui c’est vrai, leur va si bien ! Donc force m’a été comme vous dites, de les travestir, et de les accoutrer à la Française ; bien que je ne me dissimule pas que la création d’un style parfaitement applicable à des pensées étrangères, originales, souvent gigantesques, bizarres ou éloignées des habitudes modernes ne soit une œuvre pleine de difficultés ; aussi ai-je fait imprimer bien des fois depuis dix ans quelque chose de semblable à cette pensée : « La traduction d’un poème est au poème original, ce qu’une photographie est au facies humain ; ce que la peinture d’un paysage telle vivante que soit d’ailleurs cette peinture, est au paysage lui-même. Les tableaux des plus grands Maîtres ne peuvent donner qu’une idée imparfaite de la Nature : — la Nature elle-même étant plus belle que toutes les compositions humaines. » Mais parce que les choses sont ainsi, s’en suit-il que nous devions nous priver du portrait d’une personne aimée, ou de la représentation d’un site auquel se rattachent nos souvenirs ? Et dans l’espèce, parce que ce chef-d’œuvre de Burns, par exemple, « A man’s a man for a’ that, » est à peu près intraduisible, doit-il être condamné par le fait même du grandiose des