Page:Chaucer - Les Contes de Canterbury.djvu/370

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j’appris à Padoue d’un clerc dont le mérite
est prouvé par ses paroles et par ses œuvres.
Il est mort maintenant et cloué dans son coffre :
30Dieu veuille accorder le repos à son âme !

François Pétrarque, poète lauréat,
ainsi s’appelait ce clerc, dont la rhétorique douce
illumina toute l’Italie de poésie,
comme Linien[1] le fit de philosophie,
de jurisprudence ou d’autres arts particuliers[2] ;
mais la mort, qui ne souffre pas que nous demeurions ici-bas
plus d’un clin d’œil pour ainsi dire,
tous deux les a tués, et tous nous devons mourir.

Mais pour revenir à ce digne homme
40qui m’enseigna le conte dont je parlais,
je dis que d’abord il compose dans le grand style,
avant d’arriver au cœur de son récit,
un poème, dans lequel il décrit
le Piémont et le pays de Saluces,
et où il parle des Apennins, ces hautes collines
qui sont à l’ouest les confins de la Lombardie,
et du mont Vésule en particulier
où le Pô dans une petite fontaine
prend son premier essor et sa source
50pour augmenter sans cesse en coulant vers l’est
jusqu’à l’Emilie[3], jusqu’à Ferrare et Venise :
toutes choses qu’il serait long de détailler.
Et vraiment, à mon jugement,
il me semble que ce sont choses impertinentes,
sauf qu’il veut ainsi amener son sujet.
Mais voici son histoire, si vous voulez l’entendre. »

    par la Chaucer Society (2nd series, no 10) en 1875 sous le titre : Original and Analogues of some of Chaucer’s Canterbury Tale», p. 153-172.

  1. Giovanni di Lignano, mort en 1383, professeur de droit canon à Bologne.

  2. C’est-à-dire distincts, sans doute par opposition aux « artes liberales », dans leur ensemble.
  3. Région de l’Italie qui tirait son nom de l’ancienne via Æmilia et comprenait les provinces de Bologne, de Ferrare, etc.