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ANCIENNE ABBAYE DE SAINTE-CROIX.


Plus heureuse, la cheminée de marbre qui ornait le salon abbatial décore l’ancienne salle de réunion du conseil académique, aujourd’hui salle des séances de la Société des antiquaires de l’Ouest. Ce n’est plus profanation, c’est simplement spoliation.

L’abbaye de Sainte-Croix fut fondée par sainte Radégonde, épouse de Clotaire Ier. Après le meurtre de son frère, tué par ordre de son époux, elle abandonna celui-ci, et se retira près de saint Médard, évêque de Noyon, qui lui donna le voile ; puis à Saix, où elle continua à mener une vie pleine d’austérités.

Enfin, elle se rendit à Poitiers, près du tombeau du grand Hilaire, et elle y fonda un monastère, avec l’autorisation de Clotaire et le secours de Pientius, évêque de Poitiers, et d’Austrapius, gouverneur de la province.

Ce monastère fut d’abord placé sous l’invocation de la sainte Vierge ; mais, lorsqu’après sa constitution, sa clôture et les nombreuses donations qui lui furent faites, il eut reçu de l’empereur Justin le Jeune une portion insigne de la relique de la vraie croix, il changea son nom primitif et fut appelé monastère de Sainte-Croix.

Ce fut à l’occasion de la translation de ce fragment précieux que Fortunat, depuis évêque de Poitiers, et alors uni par les liens d’une amitié toute chrétienne à Radégonde et à ses saintes filles, composa les hymnes magnifiques Vexilla Regis et Pange lingua, qui furent chantées pour la première fois dans cette auguste solennité, rehaussée de toutes les pompes du catholicisme.

Placé sous la règle de saint Césaire, le monastère de Sainte-Croix fit bientôt de grands progrès ; et lorsque sa fondatrice mourut, le 13 août 587, il comptait plus de deux cents Religieuses, sous la direction d’une sainte abbesse.

Après avoir réuni dans son enceinte les filles des roi, il fut érigé en abbaye et placé sous la protection spéciale des monarques qui gouvernaient la France. Parmi ses priviléges, on cite l’exemption du service militaire et de toutes redevances.