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Le Roman anglais de Notre Temps dénationalisation sans tourner au snobisme et à la manie. Henry James avait en abondance la culture (et le cœur) qui permet de soutenir les dépenses morales du cosmo- politisme. Quand, vers la fin de sa vie, ayant en France et en Angleterre conquis droit de cité, il devint citoyen du pays de ses ancêtres au moment où ce pays courait le plus grand danger et faisait le plus grand sacrifice de son histoire, nul ne doutait depuis longtemps de la sincérité de sa vocation. Il était déjà bourgeois de l'Europe cultivée, — bourgeois gentilhomme à maint égard, mais bourgeois convaincu. Chemin faisant, il avait, en cinquante volumes de romans et d'essais, décrit l'adaptation, puis l'adoption de cette partie de l'Amérique intelligente qui jette l'ancre aux rivages d'origine. On voit dès l'abord, à ne la considérer que de l'extérieur, combien intéres- sante, mais exceptionnelle, fut cette destinée d'écrivain. Christophe Colomb à rebours, il a découvert l'Europe occidentale. Ce qu'il en a découvert, c'est presque ex- clusivement la Société, avec un grand S. Dans la Société, il n'a dépeint, avec un luxe d'ailleurs infini, que les raf- finements de l'intelligence et les complications du senti- ment. Quand, par hasard, il choisît ses personnages parmi les classes moyennes, il les regarde avec l'œil du mondain — de très près, car il est myope, et à travers son monocle. S'il décrit des enfants, c'est avec une fidélité minutieuse. Il se place exactement à leur point de vue. Mais leur point de vue est celui du milieu, du monde exceptionnel où ils vivent. Bref, Henry James fut un spécialiste de la vie élégante, cultivée, cosmopolite. Les premières œuvres de Henry James, publiées entre D 3 'fe«iby Google

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