ce que c’eſt que le Bua, & le Chua de Tonquin : je vous dirai en même temps l’origine du royaume de Cochinchine. J’ai conſulté là-deſſus M. Vachet, & M. de Courtaulin Miſſionnaires, qui ont demeuré douze ou quinze ans à la Cochinchine ; & le Pere Fuciti Jéſuite, qui a eſté vingt-huit ans ou au Tonquin, ou à la Cochinchine : & je ne mettrai ici que les choſes dont ils conviennent tous trois.
Les royaumes de Tonquin & de Cochinchine eſtoient autrefois une province de la Chine. Il y a à peu prés ſix vingts ans que les Chinois voulurent les remettre ſous le joug, & entrerent dans le païs avec une grande armée. Le Roi de Tonquin fut batu dans les premieres rencontres, & eſtoit preſt à tout abandonner, & à s’étrangler avec un cordon de ſoie, à la maniere des Rois orientaux : quand un de ſes capitaines lui promit de remettre ſes aſſaires en bon état, s’il lui vouloit donner le commandement abſolu ſur toutes ſes troupes. Il le fit ; & ce nouveau Général ſe gouverna avec tant de courage & de ſageſſe, qu’il obtint la paix des Chinois, a condition que les Rois de Tonquin envoyeroient tous les trois ans à l’Empereur de la Chine un homme d’or maſſif de la hauteur d’une coudée, un genou en terre, la tête inclinée, portant à la main droite une pique dont le fer va juſqu’à terre. Ces conditions, quoi-que dures, furent acceptées avec beaucoup de joie.
