Page:Choix de discours de réception à l'Académie françoise, tome I, 1808.djvu/127

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il parloit dans vos assemblées, et ce lieu retenti encore des applaudissemens dont vous interrompîtes tant de fois le dernier discours qu’il y prononça. Que ne m’est-il permis, pour le louer dignement lui-même, d’emprunter ici ses propres termes, et de répandre aujourd’hui sur son tombeau les fleurs immortels qu’il répandit à pleines mains sur celui de l’illustre Corneille !

Pourquoi faut-il qu’un homme si rare nous ait enlevé dans le temps qu’il alloit porter l’histoire aussi loin qu’il avoit porté la tragédie, et surpasser peut-être ce fameux Romain, qui, après avoir comme lui fait admirer ses vers sur la scène, laissa comme lui reposer la muse tragique, pour écrire l’histoire des grands événemens de son siècle !

Pourquoi faut-il que le nôtre ait été si-tôt privé d’un écrivain qui lui étoit si nécessaire ? Car enfin, Messieurs, je ne crains point de le dire, il n’y a peut-être rien de plus propre à faire comprendre toute la grandeur du règne du Roi, que d’avoir vu deux hommes si capables d’employer pour sa gloire toute la magnificence de ce qu’on appelle le langage des Dieux, renoncer à cet avantage pour transmettre à la postérité d’un style simple et sans fard cette histoire où la vérité toute pure sera encore plus merveilleuse que la fiction même soutenue de tous les ornemens de la poésie.