Page:Choix de discours de réception à l'Académie françoise, tome I, 1808.djvu/428

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Ils sont donc corrompus sans être moins courageux, et le courage ne leur reste que pour devenir l’instrument de leurs vices. C’est qu’ayant conservé tous les préjugés de leur premier genre de vie, ils sont incapables de chercher dans les lois un frein qui leur devient tous les jours plus nécessaire. Toujours jaloux de tout devoir à la force, toujours armés, leur avidité croît avec leurs succès, et elle croît d’autant plus, qu’ils mettent toute leur gloire à l’assouvir par la violence. Ainsi, leurs ames, humaines et généreuses, lorsqu’ils habitoient les forêts, deviennent féroces dans l’enceinte des villes, et cette férocité est l’effet des besoins superflus, de ces mêmes besoins qui adoucissent les mœurs des peuples civilisés.

L’Europe, après la ruine de l’Empire romain, nous offre donc tout à-la-fois, et les vices de nations barbares, et les vices des Nations polies ; mélange monstrueux, qui ne permet plus aux peuples de se gouverner par des lois ; et c’est-là le principe de cette inquiétude qui pousse successivement les générations de désordre en désordre.

Il semble que la religion chrétienne, donnée aux hommes pour établir parmi eux la justice, la paix et l’union, devoit opposer une digue à ce torrent ; mais l’instinct aveugle et brutal qui conduisoit les peuples, profana cette religion sainte, et en pervertit la morale. La superstition, qui prit sa place, devint une arme de plus, et il en naquit de nouveaux troubles. Bientôt on ne vit que des