Page:Chopin et Sand - Lettres, éd. Sydow, Colfs-Chainaye et Chainaye.djvu/127

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beaucoup de cette disposition et le Docteur assure que le voyage lui sera excellent. Ce Chopin est un ange,[1] sa bonté, sa tendresse et sa patience m’inquiètent quelquefois ; je m’imagine que c’est une organisation trop fine, trop exquise et trop parfaite pour vivre longtemps de notre grosse et lourde vie terrestre. Il a fait à Majorque, étant malade à mourir, de la musique qui sentait le paradis à plein nez, mais je suis tellement habituée à le voir dans le ciel qu’il ne me semble pas que sa vie ou sa mort prouve quelque chose pour lui. Il ne sait pas bien lui-même dans quelle planète il existe, il ne se rend aucun compte de la vie comme nous la concevons et comme nous la sentons.

60. — Franz Liszt au major Adolphe Pictet, à Genève.

[Rome avril 1839].

[…] George Dudevant Kamaroupi nous a laissés sans nouvelles depuis l’ère Chopin (9 mois environ). Elle est positivement à Marseille avec Chopin dont la santé ne s’est guère améliorée aux Baléares. Les dernières productions du Docteur Piffoëls [sic] (les Aldini, [sic] Spiridion, et les sept cordes de la Lyre) m’ont laissé une impression pénible.[2] Lélia et les Lettres d’un Voyageur sont assurément d’autres paires

  1. Ce n’est pas le premier hommage rendu par George Sand à la douceur du caractère de Chopin, ce caractère qu’elle affirma, dans la suite, (voir Histoire de ma vie) s’être montré détestable pendant la maladie dont le grand musicien souffrit à Majorque.
  2. Si Madame d’Agoult maniait la méchanceté avec virtuosité et plaisir, Franz Liszt se montre, dans cette lettre, le digne disciple de son amie.