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pauvre jalap

mes courses seul ; seul en voiture, seul en chaloupe ; à la poste, au village, seul partout ?

Pas un cri, pas un jappement, pas une caresse, pas une gambade, rien : et je ne serais pas triste ?

En me retournant, là, derrière moi, sur ce coin de sofa, si j’allongeais la main dans un mouvement de caresse, je n’atteindrais que le drap vert de la couverture… Jalap n’y est plus.

Peut-être qu’en cherchant bien je trouverais trois à quatre poils gris oubliés ce matin par le plumeau… ce serait tout.

Et je ne serais pas triste ?

Je pourrais entendre mon petit Claude appeler par tous les coins de la maison : « Zap »… « Zap »… ; je pourrais voir ma femme comprimer elle-même son chagrin ; je pourrais écouter les lamentations de la bonne, — car c’est joliment de sa faute si mon Jalap est maintenant décédé — et cependant je devrais être gai, dites-vous ?

Mais il m’accompagnait partout, me guettait aux portes des nuits entières sans se lasser, sans remuer ; il se couchait sur mes pieds, se frolait dans mes jambes, montait familièrement s’asseoir dans mon dos, sans me déranger d’écrire, sur l’espace libre du