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Claude Paysan
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Et puis il était si bon et si beau ce Claude…

Ah ! ça n’empêche pas les vieilles mères d’aimer leurs Claudes, laids, même méchants, mais il était beau celui-là. D’un brun qui aurait peut-être été un peu trop marqué pour qui l’aurait vu dans des boudoirs de ville, mais parmi ces paysans, tannés par les soleils qui font les blés mûrs, son teint achevait plutôt la virilité de sa figure et lui donnait un air mâle et solennel qui imposait.

Ses cheveux, bruns aussi, avaient poussé en masses denses qu’il tenait relevées très crânement sur son grand front songeur.

Il ne riait maintenant que bien rarement, quand Jacques lui racontait des histoires drôles arrivées à leurs amis ; alors seulement, sa bouche — qui était franche et doucement sympathique, — ses traits, prenaient leur expression vraie, leur expression de jeunesse brave et décidée, si changée depuis la mort du vieux Claude, depuis que certaines fleurs flétries se desséchaient de plus en plus dans sa chambrette, sous le toit en biseau.

On sentait toujours une pensée secrète derrière ses yeux distraits à longs cils caressants. Et ceci lui donnait un air timide et un peu sauvage…

… Oui, elle l’aimait bien son fils.

Lui aussi l’admirait et l’adorait, sa vieille mère… Ces bonnes mères, on se les représente toujours âgées… pourquoi donc ? Est-ce parce qu’il semble qu’elles doivent mieux aimer ainsi, qu’elles sont plus mères encore ?… Car celle-ci n’était pas en réalité très vieille, soixante et cinq, soixante et sept ans peut-être ; et si ses cheveux étaient déjà blanchie, c’était dû aux fatigues, aux angoisses maternelles, aux veilles pénibles plus qu’aux années.